A lot to see

Vendredi 28 décembre : Des mégaptères, les trawlers et le Cap sont en vue

Ce matin la mer est calme, il y a très peu de vent et le soleil est présent. Ah, si cela avait pu être ainsi les quatre derniers jours !

Il y a relativement peu d’oiseaux et les espèces qui dominent sont les puffins cendrés et les pétrels à larges ailes. Francis, le caméraman de la VRT, qui était en Antarctique depuis novembre, profite des conditions clémentes pour nous interviewer. Nous essayons de clairement faire passer notre message, notre travail d’inventaire permettra de «mieux connaître, pour mieux protéger ». On verra ce qui en restera dans le traitement de l’émission.

A 10h, « branle bas de combat », des souffles de baleines au loin. Une des baleines saute entièrement au-dessus de l’eau. Il s’agit certainement de mégaptères (Baleines à bosses) qui sont les plus démonstratives des grosses baleines. Je préviens tout le monde sur le bateau et bientôt sept ou huit personnes scrutent l’horizon. Elles sont trois, un jeune et deux adultes. Les baleines ressortent et l’une d’entre elles saute à nouveau. Un animal de 25 à 30 tonnes qui fait un plat sur l’eau, cela fait un beau « plouf » ! Arrivées à 800m du PAPANIN, elles sondent et disparaissent ; dernières belles images de la faune marine avant notre arrivée à Cape Town.

Subantarctic / subtropical convergence

Jeudi 27 décembre: la convergence subantarctique / subtropicale
Au cours de la nuit et très tôt ce matin, nous avons traversé la convergence subantarctique et sommes donc passés dans des eaux tempérées aux eaux plus chaudes. Cette zone est riche en nutriments et donc aussi en oiseaux. On peut aussi observer le changement d’avifaune avec la quasi disparition des pétrels soyeux et l’apparition du pétrel à larges ailes, la disparition de l’albatros hurleur et l’apparition de l’albatros timide. A l’aller,nous étions passé de nuit pour une grande part de la partie la plus méridionale de la zone subtropicale mais aujourd’hui nous la traversons de plein jour et cela nous permet de compléter nos données avec deux espèces qui y semblent inféodées : l’Océanite à ventre blanc et l’Océanite cul-blanc.

Cette zone semble aussi importante pour des espèces de chez nous qui y hivernent comme le labbe à longue queue et le puffin cendré. Nous sommes impressionnés par les nombres d’individus de ces deux espèces que nous croisons. Si notre transect est représentatif,il doit s’agir de leur principale zone d’hivernage. Peut-être que cela n’était pas encore clairement établi, à vérifier dans la littérature. Demain sera le dernier jour de la traversée…

Whales!

Mercredi 26 décembre: de la diversité à nouveau et quelques baleines
Les 40ièmes sont cléments. Le vent s’est adouci jusqu’à 3-4 beaufort ce qui permet au bateau de reprendre de la vitesse et de petit à petit rattraper son retard. A nouveau nous pouvons espérer être au Cap en fin de journée, le 28.

Même si les espèces ne sont pas très abondantes, l’avifaune se diversifie avec 20 espèces d’oiseaux sur la journée. Parmi les observations intéressantes, on peut noter la présence quasi permanente d’Albatros hurleur dans le sillage du bateau, avec parfois jusqu’à 6 individus d’âges divers ensemble. Au total, nous verrons six espèces d’Albatros aujourd’hui, nous observerons aussi trois espèces de Puffins dont les premiers Puffins majeurs du voyage, cela doit bien faire deux semaines que nous n’avions pas vu de nouvelle espèce.

Il y a également beaucoup de Pterodroma, majoritairement des Pétrels soyeux. Parmi les deux à trois cents individus vus nous notons trois exemplaires de la forme sombre. Cette forme est connue mais est mentionnée dans la littérature comme étant très rare. Un pour cent des individus ce n’est pas si rare, il serait intéressant de savoir où nichent les Pétrels soyeux que nous observons ici et de voir si la proportion des individus de forme sombre n’est pas localement plus importante dans ces colonies, ce qui pourrait avoir une signification taxonomique.

Point de vue mammifère, la journée a été très calme. Mais, en fin d’après midi, non loin du bateau, nous observons trois souffles de baleines. Elles font surface près du Papanin et, photos à l’appui, nous identifions des Rorquals boréaux (une nouvelle espèce pour moi).

En toute fin de journée, juste après avoir écrit ce qui précède, le PAPANIN arrive dans une zone avec une très forte densité d’oiseaux (entre 44°15’ S ; 19°25’E et 44°00’ 19°20’E). Il y a des dizaines de Pétrel de Lesson et des centaines de soyeux, des dizaines de Puffin semblable, des centaines de Puffins fuligineux. Les prions sont à nouveau visibles. Les albatros sont eux aussi nombreux. Derrière et autour du bateau, il y a au moins 12 Albatros hurleurs, des dizaines d’Albatros à sourcils noirs, des Albatros à tête grise et nous ajoutons l’Albatros fuligineux à la liste de la journée et du trajet retour. Dans la même zone, nous verrons deux fois des souffles lointains de baleines non identifiées. Malheureusement la luminosité diminue très vite et la nuit tombe.

Christmas at the South Pole

Mardi 25 décembre : Noël en mer et dans la cabine

Ce matin j’ai courageusement entamé les comptages mais après le deuxième, à 6 heures du matin, j’ai arrêté. La mer était vraiment trop forte avec des embruns permanents et presque pas d’oiseaux. J’ai aussi vu pendant ces comptages matinaux mes deux derniers icebergs.

Avec le mauvais temps, notre traversée a pris du retard car les vents sont contraires et ralentissent la progression du navire. L’arrivée au Cap n’est plus prévue que pour le 29 et si on se tape encore deux dépressions comme celles que l’on vient d’avoir cela n’est même pas certain. Cependant statistiquement ce serait incroyable que nous ayons 4 grosses dépressions sur notre trajet !

Cette après-midi nous sortons enfin de l’océan glacial antarctique et rentrons dans l’Océan indien en même temps que nous traversons le 50ième parallèle. Le mélange des eaux froides et des eaux plus chaudes provoquent des zones de brumes caractéristiques de cette transition. A nouveau nous observons un Albatros hurleur, un Albatros à sourcils noirs et un Albatros à tête grise mais, contrairement au voyage alle,r ils ne suivent pas le bateau. Parmi les Prions, nous différencions trois espèces (de la Désolation, à bec fin et gracile) assez facilement grâce à l’expérience acquise et à l’examen des centaines de photos faites à l’aller.

Fin d’après-midi, le vent souffle toujours mais la tempête diminue. Espérons que la traversée des 40ièmes sera une partie de plaisir !



Lundi 24 décembre : la tempête se termine et recommence


Hier soir la tempête donnait l’impression de se calmer. Ce matin, on a donc pu faire quelques comptages. Nous avons revu des espèces déjà observées à l’aller comme par exemple l’Albatros royal du sud, le Pétrel soyeux, le Pétrel de Lesson et l’Océanite à ventre noir.
Mais bien vite le vent se rappelle à notre bon souvenir. Nous avons tous, équipage compris, un air vraiment maladif ! En soirée, le vent redouble de vigueur (9 Beaufort) et malgré que le cuistot nous ait très gentiment préparé des crêpes et des salades russes l’ambiance n’était pas au top lors de la petite fête de noël.

Out of order

Dimanche 23 décembre : HS (hors service)
Le capitaine avait raison, la dépression était profonde : vent jusqu’à 10 beaufort, accompagné d’une forte houle. On a mis 20 heures à la traverser et ce ne fut pas sans mal (de mer).

Le matin je me suis réveillé vaillant mais cela ne durera pas. J’ai pour la première fois du voyage raté un repas et pas qu’un peu puisque j’ai évité le petit déjeuner, le déjeuner et le quatre heure, mon régime est relancé.

Nous n’avons donc pas été très efficaces dans nos comptages. De plus, le capitaine interdisait aux passagers toute sortie sur les ponts extérieurs. Au total de cette journée une seule espèce d’oiseaux a été ajoutée à la liste du retour, le Prion à bec fin.

First bad weather

Samedi 22 décembre : première journée de mauvais temps
Nous quittons les zones de pack et allons reprendre aujourd’hui les comptages d’une demi-heure toutes les heures. Au début les espèces d’oiseaux restent les mêmes mais petit à petit réapparaissent le Pétrel bleu, Le Pétrel de Kerguelen, le Prion de la Désolation, l’Albatros fuligineux et diminuent les Pétrels des neiges et antarctiques. Enfin une journée où nous verrons plus de dix espèces d’oiseaux !

Les comptages ne se font pas dans des conditions idéales : il fait très couvert, brumeux et nous progressons parfois dans un brouillard épais. Peu à peu, la brume se dissipe mais le vent forcit. Nous entrons dans une belle dépression ! Heureusement pour nous, il reste des zones de glaces qui atténuent la force des vagues et malgré des vents, qui doivent avoisiner les 7-8 beauforts, la mer n’est pas très agitée. Sur un des îlots de glace flottante je trouve un Phoque bicolore, très pâle dans ses parties inférieures avec une gueule puissante, un Phoque léopard, la dernière espèce antarctique que nous voulions voir. En fin de soirée, le capitaine nous annonce que la dépression continue à se creuser et qu’elle a au moins 250 milles de largeur !

The longest day

Vendredi 21 décembre : le jour le plus long
Réveil tardif. Au petit déjeuner à 8h je suis seul. Je fais un comptage mais l’avifaune reste toujours aussi pauvre et cela devrait encore durer tant que nous restons dans les glaces.

En fin d’après midi nous traversons le cercle polaire dans l’autre sens. Pour nous le soleil va se coucher pour la première fois depuis longtemps mais comme nous sommes au solstice et que nous resterons tout près du cercle il y aura toujours un peu de clarté. Néanmoins elle ne sera pas suffisante pour observer.

Un peu avant d’atteindre le cercle polaire le capitaine avait fait arrêter son navire pour un contrôle des machines et un nettoyage du pont. Le PAPANIN restera à la dérive dans une zone de mer bien dégagée pendant trois heures sans attirer le moindre oiseau.

Nous repassons dans les zones où nous en avions observés, au voyage aller, beaucoup de petits rorquals. Ils ne sont plus au rendez-vous. Nous observons néanmoins trois Hyperoodons. Ces petits cétacés sont les baleines à bec les plus souvent observées dans l’antarctique. Ils ont une grosse protubérance arrondie sur la tête et peuvent plonger jusqu’à 2000 mètres de profondeur. Les phoques sont eux aussi beaucoup plus rare qu’à l’aller.

Nous serons encore demain toute la journée au régime glace. Même le plus gourmand en serait saturé. A propos de régime on nous a servi aujourd’hui du « Plov » au repas de midi. C’est un plat Kazakhe qui ressemble au biryani indien. En général la nourriture est bonne contrairement à nos craintes du début. Le cuisinier Azery fait très bien les carbonades flamandes (ou en tout cas quelque chose qui y ressemble très fort), le bordj et donc le plov… il y a aussi un changement important dans nos habitudes aujourd’hui, le nombre de passagers ayant diminué nous allons à partir de maintenant manger avec l’équipage à 7.30, 11.30, 15.30 et 19.30.

Leaving Crown Bay

Jeudi 20 décembre : nous quittons Crown Bay, le voyage du retour débute
Ce matin, le navire est calme, les gens se reposent comme le Phoque de Weddel qui est revenu après son absence de deux jours. Au déjeuner quelques têtes réapparaissent, la première traverse qui était partie il y a trois jours jusqu’à la base est revenue et donc tous les passagers qui vont embarquer vers Cape Town sont là. Le départ est fixé à 16.00. Les membres de l’équipe qui partent vers la base sont en train de vider leur cabine et de préparer leurs baguages.

Russian colleague in the water

Mercredi 19 décembre : un russe se baigne dans l’océan glacial antarctique

Aujourd’hui a débuté très fort avec la baignade vers une heure du matin d’un des matelots russes du PAPANIN. Il ne doit pas y avoir beaucoup de personnes qui se soient baignés volontairement dans l’océan gla…, gla…, glacial antarctique mais ce matelot, d’une taille colossale, a fait un pari. Après une séance de sauna, il a effectivement plongé et fait quelques brasses au bord de la banquise.

Toutes les personnes qui étaient éveillées à ce moment et toute la presse et photographes présents sur le bateau ont assisté et documenté son exploit.

Après une courte nuit les opérations de déchargement ont repris. Toutes les opérations se sont déroulées sans incident notoire sauf que lors d’une manœuvre de ce matin un des traîneaux s’est pris dans les chenilles du tracteur qui a viré trop fort et tout le bois qu’il transportait est tombé en vrac sur la glace de neige. Alain Hubert qui conduisait le tracteur n’était pas très fier. Nous avons tranquillement ramassé tout ce bois et par après, au repas, il nous a dit « Et bien avec vous, j’aurais au moins appris à parfois fermer ma gueule», on peut apprendre à tout âge ».

Au même repas, on a eu des pains saucisses… joie de certains, il ne nous manque plus que des frites et on est au pays !

Vers minuit, au moment où j’écris ces lignes, le débarquement se termine. Il reste 8 ou 9 traîneaux de fûts ou de blocs de béton à transporter, nous partirons bien le 20, j’ai gagné mon pari et le capitaine se fait tout petit. Comme au départ il n’était pas grand, il est minuscule. Grand seigneur je lui offre un des nombreux paquets de M&M’s que nous avions commandés et enfin retrouvés dans les stocks, après deux semaines de voyage

Aujourd’hui une nouvelle espèce d’oiseau pour Crown Bay, le Pétrel du Cap.

Antarctic driver's licence

Mardi 18 décembre : j’ai obtenu mon permis de chauffeur antarctique

Les journées deviennent un peu routinières. Lever à 8.00, petit déjeuner, attente des premiers «Prinoths », chargement des containers, attente, chargement…, déjeuner à 12.00, attente, chargement, attente …

Pendant les attentes nous avons le temps d’entamer de nouvelles discussions avec Alain Hubert. Aujourd’hui, j’ai aussi fait mes premières traversées vers le site de dépôt, cela semble très proche mais il faut tout de même plus de 20’ en tracteur pour y arriver. Le fond de la baie et la remontée sur le plateau sont vraiment de toute beauté. La piste passe entre de douces vagues de neiges et quelques falaises de glaces bleutées du plus bel effet. J’ai également pu conduire un véhicule chenillé. on n’avance pas sur ces trucs ! Les longues traversées de 20 heures doivent vraiment être pénibles. Mais bon, j’ai encore une nouvelle ligne à ajouter à mon CV : «chauffeur en antarctique».

Le nombre des containers continue à diminuer. Douze containers, 800 barils de pétroles, 12 tonnes de bétons, quelques palettes de bois et une grue de chantier, voilà ce qui devrait encore être chargé demain, la date du 20 pour notre départ me semble toujours tenable. Le capitaine du navire est plus pessimiste. Il croit que nous ne partirons que dans trois jours. J’ai parié avec lui... évidemment c’est lui qui décide du départ et il va peut-être tricher. Il y a une petite dépression qui s’annonce pour demain avec des vents de 5-6 Beaufort ce qui pourrait aussi nous retarder.

Et avec toute cette routine, j’ai oublié la corvée lessive. Vraiment pas de chance!

Pour ce qui est de la faune, on observe les mêmes espèces : Phoque de Weddel, Océanite de Wilson, Labbe de Maccormick, Pétrel des neiges, Pétrel antarctique.

Efficiently unloading the boat

Lundi 17 décembre : on devient efficace
Une journée bien rythmée; le déchargement progresse. Vers 22h, sur les 104 containers et divers équipements, il ne reste plus que 45 containers à décharger. Si cela continue ainsi, nous pourrions avoir fini le 20 décembre et donc être de retour au Cap bien en avance sur l’horaire!

Ce soir un premier convoi est parti vers la base à 210 km d’ici.

Point de vue mammifères, rien mis à part un phoque de Weddel sur la glace, très complaisant et très paresseux. Aujourd’hui, pour vous être agréable, nous n’avons plus revu de baleines. Peut-être que les mouvements du bateau hier soir les ont un peu éloignées. Le phoque a été salué par tous les membres de l’équipe et de l’équipage ainsi que par un Manchot adélie, curieux comme tous ses frères et sœurs. Le Manchot adélie était la seule espèce d’oiseau de l’Antarctique vrai que nous n’avions pas encore observée à Crown Bay, maintenant il n’y a plus que des raretés à découvrir.

L’ornithologie à Crown Bay en Antarctique c’est un peu la même chose que celle que l’on fait à Zeebruges en Belgique, des bateaux, peu d’espèces locales, mais beaucoup de raretés…, sauf qu’ici c’est beau !

Mooring!

Dimanche 16 décembre : le bateau rompt ses amarres

Nous participons au déchargement. Placer des barils de fioul sur les traîneaux, déplacer des containers, grimper sur leur toit pour détacher les filins, débarquer des caisses : on devient de vrais dockers de l’Antarctique ! Pendant ces travaux, comme le rythme d’arrivée des traîneaux n’est pas très élevé, j’ai le temps d’observer un petit rorqual, tout, tout près du bateau, un phoque crabier sur la glace, un Manchot empereur intrigué, de nombreux pétrels des neiges, un Pétrel antarctique et deux Labbes de Maccormick. En soirée, arrive ce que le capitaine craignait. J’étais en train de discuter sur le pont avec Alain Hubert, de sciences, de recherches antarctiques, d’ours polaire lorsque des « tonks-tonks » sourds se font entendre. Les amarres se tendent, le bateau bouge et recule très lentement. Toutes les personnes sur la glace sont rappelées d’urgence vers le bateau, l’échelle de coupée glisse ; bientôt le bateau ne sera plus accessible. Deux des amarres lâchent avant que les moteurs ne soient relancés. Au même moment la baleine refait son apparition près du bateau. Alain Debroyer, parti vers la plateforme, n’est pas rentré et devra dormir dans un container là bas. Les opérations de déchargement sont suspendues. Le capitaine relance le bateau dans la glace un peu plus loin. A minuit, le navire retrouve un bon point d’amarrage, à proximité de l’ancien et les manœuvres d’accostage recommencent. Demain, on pourra reprendre le débarquement.

First dischargement

Samedi 15 décembre : mouillage et premier déchargement
Reprise des essais d’accostage après le petit déjeuner. Il faudra deux heures avant que le bateau n’entre dans la glace, sans trop la briser, pour lui permettre de fixer des amarres. Une heure et demie pour creuser la glace afin de fixer les bites d’amarrages. La passerelle enfin déposée, Alain Hubert et son équipe montent sur le bateau. Petit briefing et répartition des tâches. Les travaux de déchargement commencent. Au début pas grand-chose ne bouge, deux traineaux sont sortis, des petites pièces aussi, des containers changent de place sur le bateau, les tracteurs à bord reçoivent leurs chenilles et nous, nous lisons, rédigeons, entrons des données dans la base de données. Dans la baie, très peu d’oiseaux, quelques pétrels des neiges, un pétrel antarctique, un fulmar antarctique et une océanite de Wilson qui vole cinq minutes autour du Papanin.

Breid Bay

Vendredi 14 décembre : arrivée à Breid Bay
Le soleil est voilé ce matin et le vent de l’est assez fort. Nous naviguons toujours dans de l’eau libre. Pas plus d’oiseaux qu’hier mais présence de fulmar antarctique, de six sternes arctiques, de pétrel-géant du Sud et d’un Labbe de Maccormick, toutes des espèces que nous n’avions plus vues depuis le 9 ou le 10 décembre. Au milieu de la journée nous croyons nous approcher du continent mais ce que nous voyons est un immense iceberg de 40 x 32 km., soit 1280 Km²! Finalement, vers 19h30 nous arrivons à destination : une petite baie baptisée Crown Bay située à un degré à l’ouest de Breid Bay. Au loin, deux motoneiges et quatre petites silhouettes se déplacent sur les plaques. Contact radio avec Alain Hubert. Le navire brise la première plaque de glace de mer sur environ un km afin de trouver un ancrage sûr dans de la glace plus ancienne. Au fond de la baie, à peut-être deux kilomètres, il y a une rampe qui permet de remonter sur les falaises de glace et d’atteindre le lieu prévu pour le stockage des containers et du matériel.

Again... Ice and water

Jeudi 13 décembre : eaux libres et pack
C’est une journée de transition. Nous retraversons le pack d’ouest en est. Les zones d’eaux libres alternent avec les zones prisent par la glace. Peu après midi, le Papanin s’immobilise à la demande des militaires pour leurs permettre de réarranger les containers et monter les chenilles des tracteurs des neiges en vue du débarquement de demain. Le bateau repart vers 16h. Peu après, on quitte le pack pour une zone de mer bien dégagée. Du point de vue de nos inventaires faunistiques, nous effectuerons au cours de cette journée quatre comptages, d’une heure chacun, sans jamais observer plus de 10 Pétrels antarctiques par heure. Comme hier seulement quatre espèces d’oiseau, dont aucune nouvelle, et très peu de mammifères sur la liste.

Breid bay

Mercredi 12 décembre : départ de Five East Bay, en route vers Breid Bay
18 heures : les amarres sont lâchées et nous allons reprendre la mer vers le nord et ensuite l’est pour rejoindre Breid Bay à 24° est. Si la mer est dégagée nous pourrions y arriver après demain.

Five East Bay

Mardi 11 décembre : Five East Bay, ses vues imprenables, ses cétacés remarquables
Le déchargement des 1800 barils de pétrole pour les norvégiens est en cours mais cela prend du temps. Le travail est fait par les militaires belges, les norvégiens et les marins russes. Gros cétacés dans la baie : 6 baleines que nous identifions facilement comme des Baleines-à-bec de Arnoux qui longe la côte de glace. Il y a trois jeunes et trois gros adultes. Ces baleines, de presque dix mètres de long, restent tranquillement quelques minutes sur le bord de la glace avant de disparaître en plongée pendant 10 minutes. Les manchots sortent précipitamment de l’eau. Plus tard, nous observons des Orques dans la baie. Je monte jusqu’à la passerelle de commandement pour chercher ma longue-vue et finalement ce sont au total 22 orques dont 5 grands adultes.

Five East unaccessible...

Lundi 10 décembre : Five East de plus en plus inaccessible ?
Le bateau progresse lentement dans le pack et s’arrête parfois dans la masse de glace. Le Papanin fait des marches arrières de quelques centaines de mètres pour se relancer une fois, deux fois avant de passer l’obstacle. La faune est presque absente et ce sont toujours les mêmes espèces : Phoque crabier, Pétrel antarctique et Pétrel des neiges, parfois un Manchot empereur et une Sterne arctique. Nous restons cependant motivés car nous espérons observer un Orque épaulard ou un Phoque léopard. Sur la glace de mer, un grand phoque qui dort, notre premier Phoque de Weddel. Il y a aussi un petit groupe de Manchot empereur et une troupe plus importante de Manchot adélie.
L’amarrage du Papanin mettra du temps. Quelques marins débarquent, en utilisant une nacelle, pour enfoncer de larges pieux dans la glace. Ensuite le bateau commence une nouvelle manœuvre d’approche et lance ses câbles d’amarrage. Il faudra deux essais infructueux avant de réussir. Finalement vers 22h le bateau est à quai. Petit briefing pour nous expliquer les mesures de sécurité à respecter et les travaux prévus pour le débarquement du matériel des norvégiens. Une petite dizaine d’entre nous décident de faire un tour à terre d’environ deux heures et d’aller voir de plus près les manchots. C’est vraiment amusant de voir les adélies s’approcher vers nous en se dandinant. Ils sont curieux mais pas téméraires et si on se couche au sol ils s’approchent jusqu’à deux mètres, les oiseaux en deuxième file poussant dans le dos ceux de la première qui protestent énergiquement. Les empereurs sont plus placides et moins curieux, mais nous pouvons aussi les voir à quelques mètres sans les déranger. Nous avons ensuite été voir le Phoque qui tellement immobile semblait mort. Mais non, il respire et finalement s’éveille. Tout cela sous le soleil de minuit, avec une lumière soyeuse, ce qui ferra certainement de cette sortie un des évènements les plus mémorables de ce voyage.

Five East

Dimanche 9 décembre : le continent des brumes et arrivée à « Five East »
Tôt ce matin, la brume nous a empêché de voir les terres mais vers 9h le soleil apparait. Au loin, les falaises de glaces dominent la mer gelée. De nombreux icebergs tabulaires se sont détachés de la falaise et commencent à dériver lentement dans les eaux libres. Sur la mer gelée, quelques phoques crabiers au repos et parfois quelques manchots empereurs. Au pied des immenses icebergs flottants, des concentrations de Pétrel antarctique et de Pétrel des neiges. Tournant autour du bateau, des Océanites de Wilson, des Fulmars antarctique et des Pétrels géant. Mais plus de baleine : une mer plus ouverte et des vents forts rendent probablement leur observation plus difficile. La navigation devient compliquée. Nous entrons dans une grande masse de glace plus ou moins fondue et le bateau avance péniblement. Après trois-quatre essais infructueux et des allers-retours dans la glace pendant environ deux heures, le capitaine décide de repartir au large et de tenter le passage un peu plus au nord. Nous n’arriverons pas à « Five East » ce soir. Point de vue faune, ces manœuvres dans la glace ont rapidement attiré des curieux et trois Skuas de Maccormick tournent autour de nous, espérant profiter de quelques opportunités.

Whales at the polar circle

Samedi 8 décembre : traversée du cercle polaire antarctique et des baleines en nombre
Au milieu de la « nuit » le bateau modifie sa course générale plein sud pour obliquer vers le sud-ouest en direction de la base norvégienne de « Five East ». Les norvégiens ont aussi affrété le Papanin pour approvisionner leur base. Traversée du cercle polaire vers 5 heures du matin. Le soleil ne se couchera plus pour nous pendant deux bonnes semaines. Ce matin le pack est plus ouvert et le bateau zigzague en suivant des chenaux de mers ouvertes. La faune est plus abondante. Rapidement les premiers rorquals antarctiques se montrent. Enfin des baleines (17) et quelques phoques posés sur les plaques de glace, presque tous des phoques crabier mais également un Phoque de Ross.

Ice everywhere

Vendredi 7 décembre : le pack, le pack, le pack
Depuis hier soir nous sommes dans le pack continu, sur de la "pancake ice". Cette expression traduit assez bien le milieu : des étendues de «crêpes » de glace accolées les unes aux autres. Le bateau traverse sans problème ces glaces flottantes jusqu’à 8.30 ce matin où, tout d’un coup, il s’arrête. Une courroie est détendue ou cassée. Juste à ce moment, je vois une Océanite de Wilson qui suivait le sillage. Petit à petit, le bateau dérive et crée une étendue d’eau ouverte sous le vent. Les 35 Pétrels antarctiques qui nous suivaient en profitent et se reposent sur les bords de cette flaque, trois manchots adélies curieux et bavards les rejoignent. Ils s’approchent du bateau, mais pas trop ! Une centaine d’autres sont posés sur le premier iceberg lointain. Un Manchot empereur immature s’approche du bateau. C’est un peu comme si tous les manchots du coin venaient voir cette grosse bête qui flotte au milieu de la mer de glace : cela rappelle le désert marocain, où dès que l’on s’arrête cinq minutes, apparaissent, venus de nulle part, quelques curieux.
Après réparation, le bateau repart lentement dans le pack. Nous traversons des zones de glaces de plus en plus compactes. Le Papanin a des difficultés à briser ces grandes plaques qui le ralentissent. Le reste de la journée, nous n’observons, outre les manchots, pétrels et sternes arctiques, que quelques phoques crabiers lointains sur le pack. Le soleil ne se couchera qu’en toute fin de jour vers 23.30 pour se relever presque immédiatement. Nous ne sommes pas encore au cercle polaire mais nous sommes tout près du solstice.

Ice and water

Jeudi 6 décembre : le pack, la mer, le pack, la mer… les 60ièmes déferlantes
Nous pensions entrer définitivement dans les glaces jusqu’à notre destination mais vers minuit le bateau retraverse une zone dégagée et vers 3h.30 je reprends les comptages. La bonne surprise de la journée, c’est l’observation vers 5h d’un Hyperodon austral (gros cétacé, famille des baleines à bec) à une vingtaine de mètres du bateau. Cela vaut tout de même la peine de se lever aussi tôt ! Le pack refait son apparition au fur et à mesure que nous avançons. La diversité en oiseau est de moins en moins grande. Celle-ci se limite aux deux pétrels et au Prion antarctique avec de temps en temps des Sternes arctiques (oui arctiques, celle de chez nous) qui passent à toute vitesse, direction plein sud. Le Pétrel à menton blanc nous quitte vers 9h du matin. Point de vue mammifère, ce n’est pas l’abondance, mis à part des phoques crabiers dans les zones de glace, aucun cétacé depuis ce matin, nous nous attendions à en voir beaucoup plus, peut être sont ils encore plus au sud ?

First icebergs

Mercredi 5 décembre : premiers icebergs, le pack, pétrel antarctique, pétrel des neiges
53°10’ de latitude Sud : nuit courte et forte houle qui a fait valser une partie des objets mal arrimés. Premier comptage à 4 h40. Il fait glacial. Les oiseaux se regroupent derrière et autour du bateau. Certains partent loin au large mais reviennent toujours dans notre sillage. C’est particulièrement le cas de cinq ou six albatros fuligineux à dos clair et de très nombreux prions antarctiques. Il y a aussi un pétrel à menton blanc qui nous suit depuis deux jours et qui sera encore présent le soir : il risque de battre le record de latitude sud pour l’espèce. Après le déjeuner, premier iceberg à l’horizon. Un deuxième, plus proche du bateau, apparait. Posés sur lui, une centaine de manchot adélie. Peu après, nous trouvons nos premiers pétrels antarctiques et le premier pétrel des neiges. L’apparition de ces deux espèces strictement liées au continent antarctique annonce la première zone de pack flottant que nous atteignons vers 19h30. Beaucoup de pétrels antarctiques et des neiges ainsi que les premiers phoques crabiers qui se prélassent sur les blocs de glaces flottants.

Arrival on the Ice Sea

4 décembre : Arrivée dans les 50ième rugissants et dans l’Océan Glacial Antarctique
De tempête point, mais première neige. Le temps est calme. Il fait nettement plus frais. On sent que nous approchons de l’Océan Antarctique. Tous les albatros semblent nous avoir quittés. Peu avant 7h, le premier Albatros hurleur de la journée fait son apparition. Puis, les choses changent et nous observons nos premières nouvelles espèces de la journée : des Pétrels-plongeurs de Géorgie du Sud et les premiers manchots macaronis.
Plus tard, on observe des dauphins crucigère (Hourglass Dolphin), un Manchot macaroni, une baleine à bosses,deux espèces d’Albatros fuiligineux, dont le fuligineux à dos sombre, le Pétrel bleu et une nouvelle espèce de Prion.
L’approche de la convergence se remarque. La mer est bonne et c’est un vrai bonheur de voir défiler à quelques mètres les Prions, l’Océanite à ventre noir, le Pétrel bleu et de temps en temps un Albatros, le tout sur un fond bleu océan. Pour demain on nous promet les premiers icebergs

Albatros festival

3 décembre : festival d’albatros
Dès le début de la journée, deux albatros hurleur et un albatros royal se mettent dans le sillage du bateau. Ils seront rejoints par toute une série d’autres grands oiseaux et par d’encore plus nombreux «petits » albatros (à tête grise, à sourcils noirs, fuligineux). Plusieurs centaines de prions accompagnent le bateau ainsi qu’en permanence des pétrels à menton blanc et des Océanites à ventre noir . Superbe ! Le capitaine annonce une mauvaise nouvelle : on se dirige vers une tempête de 10 Beauforts qui remonte du sud. Demain, l’entrée dans les cinquantièmes déferlantes risque de ne pas être drôle. Fin journée calme : petit à petit les grands albatros
quittent le navire.

Albatros

2 décembre : mal de mer et premier Grand Albatros
La nuit a été agitée, le bateau commence à bouger dans tous les sens. Nous croisons notre première dépression. Il y a maintenant beaucoup plus de Pétrel soyeux et quelques individus des deux autres espèces de Ptérodroma mais pas grand-chose d’autres. Nous sommes encore en zone subtropicale et les eaux ne sont pas très riches. En début d’après midi nous entrons dans les 40ièmes rugissantes et, même si ce n’est pas la tempête, la mer se forme et, comme par miracle, notre premier Albatros hurleur se montre. Vers 17h, il y a plein d’oiseaux, nous sommes en train de traverser la convergence subtropicale et cette zone de contact entre deux masses marines est beaucoup plus productive avec de nouvelles espèces comme les Prions et le Labbe à longue queue.

Cape Town & Albatros

30 novembre - 1er décembre: départ de Cape Town et premier Albatros
Le bateau russe, le « Papanin », affrété la Fondation Polaire pour transporter la base Princesse Elisabeth, est rustique, un peu rouillé mais il a l’air solide. Vers 19h, tout est à bord et le départ semble imminent. Il ne reste plus qu’à refiouler le bateau mais le quai est occupé par un gros gazier. Le départ est reporté au lendemain 1er décembre. Pressé, le capitaine met le cap au sud. Dès le début, il y a plein d’oiseaux et quelques otaries, mais ce sont des espèces côtières : cormorans, fous, goélands dominicain, sternes, quelques labbes pomarins et parasites. Il y a aussi des manchots et les premiers puffins fuligineux. Nous observons notre premier Albatros : un Albatros timide. Plus tard, d’autres albatros dont une nouvelle espèce, l’Albatros à bec jaune de l’océan Indien, quelques Pétrels géants, des Puffins cendré, des Ptérodromes à grandes ailes et beaucoup de labbes. Nous arrivons sur les zones de pêches des trawlers du Cap. Après cette zone d’activité intense les choses se calment, nous ajoutons encore quelques espèces comme la Mouette de Sabine. En fin de journée nous voyons nos premiers cétacés, 3 Hyperodons.

Cape Town / South Africa. Photo de René-Marie Lafontaine


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Blog réalisé par Jiska Verbouw et Marie-Odile Beudels (IRScNB-KBIN). Traductions Jan Claerbout, Jiska Verbouw (KBIN)et,pour l'anglais, Jean Devillers Terschuren (Collaboratrice IRScNB).

Mission réalisée par René-Marie Lafontaine (IRScNB) et Alain Debroyer (Collaborateur IRScNB).
Avec le soutien du Fonds Léopold III et de l'IPF.


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Grey-Headed Albatross - Albatros à tête grise. © Alain Debroyer